Instituteurs à Liorac en 1901 :
Jean Castang et Marie Bazadet

Comme nous l'indique le recensement, Jean CASTANG et son épouse étaient les instituteurs de Liorac en 1921, mais cela faisait déjà vingt ans qu'ils exerçaient dans la commune.
Leur parcours professionnel avait été auparavant un peu chaotique, voyons leur histoire (AD24 1T41).
 

Jean CASTANG*


Il naquit en 1868 à Ste Sabine, maintenant Sainte-Sabine-Born. Il décida de devenir instituteur et obtint son brevet élémentaire en 1885 (cliquez sur l'image pour l'agrandir).
Son père était le maire républicain de Ste Sabine, et à ce titre, il usa de toute son influence pour faire nommer son fils à un poste d'instituteur titulaire. Il échangea ainsi multiples courriers avec le Sous-Préfet, le Préfet, le Conseiller Général, le Député Labatut, le Sénateur Garrigat et l'Inspecteur d'Académie !
Enfin en 1892, Jean Castang fut nommé instituteur titulaire à Saint-Avit-Sénieur. Puis il rencontra celle qui allait devenir son épouse, Marie Bazadet.
(* Malgré la similitude du patronyme, il ne s'agit pas de mon père ni même de ma famille.)

Marie BAZADET


Elle naquit à Limeuil en 1865. A sa naissance, ses parents, Jean Bazadet et Marie Lavialle, étaient instituteur et institutrice à Limeuil. Elle devint elle même institutrice. Elle était en poste à Montcarret lorsqu'elle épousa Jean Castang en 1894. Les nouveaux mariés demandèrent alors un poste double et la rentrée suivante furent nommés à Queyssac.

Les conséquences d'une rumeur


Mais en 1900, "une affaire" va conduire à leur déplacement et à leur nomination à Liorac.
Le contexte : en mai 1900, les élections municipales opposent à Queyssac le maire républicain sortant, Mr Couture, à la liste nationaliste de Mr Fargaudie. Le maire sortant est battu. Sur un fond d'anticléricalisme propre à cette époque en France, il faut trouver un "coupable", ce sera l'instituteur ...


Juillet 1900, Mr Couture au Préfet
Suite à notre dernière conversation, j'ai l'honneur de vous rappeler que l'on doit attribuer aux intrigues de L'Instituteur de Queyssac les changements au profit des adversaires de la République lors de nos dernières élections municipales. Je crois en conséquence et je suis assuré d'être l'interprête fidèle de tous les bons républicains de Queyssac qu'il serait indispensable de changer Mr Castang l'Instituteur et sa femme pour la rentrée prochaine.
EN MARGE :" attendre le rapport de l'Académie".

Le 19 juillet 1900, le Sous-Préfet de Bergerac à Monsieur le Préfet de la Dordogne
Mr et Mme Castang, instituteurs à Queyssac n'ont pas su garder pendant la dernière période électorale, la neutralité qui leur était commandée par la situation politique de la commune. En compagnie du curé, ils ont très nettement pris parti contre le Maire républicain sortant, Mr Couture qui entretenait avec l'administration les meilleurs rapports et ont prêté le concours le plus dévoué à Mr Fargaudie dont la liste nationaliste a triomphé. Je vous serais reconnaissant , lors des prochains mouvements, de donner à Mr et Mme castang une autre destination

1er août 1900, l'Inspecteur primaire de Bergerac à l'Inspecteur d'Académie de Périgueux :
Mr et Mme Castang, instituteurs à Queyssac ont été signalés comme n'ayant pas su garder, pendant la dernière période électorale, la neutralité qui leur était commandée par la situation politique de la commune. Ils sont accusés en outre d'avoir, en compagnie du curé, très nettement pris parti contre le Maire républicain sortant, M. Couture.
Je me suis rendu à Queyssac lundi 30 juillet, pour procéder à une enquête. Des renseignements que j'ai pu recueillir, il résulte qu'aucun reproche n'est adressé à M. Castang. M. Couture lui-même reconnait qu'il est resté étranger à la lutte électorale. Mme Castang est réputée comme cléricale.
Le grief le plus grave est d'avoir, avec le curé de la commune, des relations très suivies. En effet à maintes reprises, M Couture se rendant à la mairie, trouva le curé chez l'instituteur et ne put traiter les affaires pour lesquelles il était venu à l'école.
Visites fréquentes du curé à l'instituteur et à l'institutrice, promenades en voiture le soir après dîner, services réciproques (l'instituteur a sa voiture dans une remise dépendant su presbytère) tels sont les faits qui ont motivé la présente plainte. Si j'ajoute que le curé est nettement hostile au parti républicain, il sera facile de comprendre que les relations aussi assidues aient fait suspecter M et Mme Castang.
Y a-t-il cependant des circonstances atténuantes à leur attitude ?
Le village de Queyssac n'est formé que de l'école, du presbytère, de deux auberges et de deux autres maisons. Ni voisins à fréquenter, ni distractions d'aucune sorte, telle est la vie des instituteurs dans cette campagne isolée. C'est sans doute pourquoi ils n'ont pas su garder la réserve que leur commandait la situation politique de la commune. Mais du point de vue professionnel Mr et Mme Castang n'ont nulement démérité et si lui est un instituteur seulement passable, madame Castang est au contraire une institutrice zélée, intelligente et qui obtient de bons résultats.
En résumé, ces deux fontionnaires n'ont pas pris une part active aux luttes de parti, aucun fait précis dans ce sens ne peut leur être reproché; mais leur relation avec un curé dont les opinions sont bien connues, rendent leur maintien difficile.
J'estime donc qu'il y aura lieu de les déplacer, mais que les faits qui leur sont reprochés ne méritent pas une disgrâce. Ils pourront être compris dans un des prochains mouvements lorsque l'administration pourra leur assigner un poste équivalent à celui qu'ils aoccupent ...

Déplacement à Liorac
Le Préfet arrête le 17 mai 1901 : Mr Castang instituteur titulaire, chargé de la direction d'une école à Queyssac est nommé en la même qualité (5ème classe) à Liorac en remplacement de M Dussolier appelé à Valeuil. Mr l'Inspecteur d'Académie est chargé d'assurer l'exécution du présent arrêt qui aura son effet à partir du 16 mai 1901.
 
En juin 1902, il demandera le poste de Ste Sabine mais sans succès. Le couple restera donc à Liorac et en 1921 ils étaient toujours instituteur et institutrice de la commune.
Jean Castang sera souvent témoin pour les actes d'Etat Civil à la mairie de Liorac. Il signera en particulier le 19 avril 1922 lors du décès à la Martigne de Jean FONTAYNE, l'ancien instituteur de Liorac : "témoin, Jean Castang instituteur âgé de 53 ans, domicilié dans cette commune et voisin du défunt".
 
 

@ Marie-France Castang-Coutou
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